À part les livrets réglementés, la rémunération affichée de la grande majorité des produits d’épargne (livret, épargne logement, assurance vie, SCPI...) ne correspond généralement pas à ce que vous allez réellement toucher. Le rendement net de tous frais et impôts peut être jusqu'à deux fois moins élevé que le gain annoncé. Nos conseils pour réduire cet écart et gagner plus avec vos placements.
Vous ne vous êtes jamais dit que votre épargne s’appréciait moins vite qu’elle ne devrait ?
Ça n’est pas forcément une vue de l’esprit. Au-delà de l’inflation, qui rogne le pouvoir d’achat de tous types de revenus de manière uniforme, les rendements de nombreux placements sont en réalité moins élevés qu’ils n’en ont l’air. En cause : la fiscalité et/ou les frais prélevés par les intermédiaires.
L’objet de cet article est d’établir les «vrais» rendements par grandes classes de placement. Par «vrais», nous entendons l’argent que vous gagnez réellement, net d’impôts, de frais et de prélèvements sociaux. Et la différence peut être significative. Sur des investissements de plusieurs dizaines de milliers d’euros, quelques centaines d’euros d’écart ne sont pas rares.
Découvrez les vrais rendements estimés par Le Revenu pour l’épargne réglementée, l’assurance vie, les SCPI, les PEA, les comptes titres et l’immobilier locatif.
Livrets et épargne réglementée
Les rendements des livrets réglementés sont les plus transparents. Il n’y a aucun «piège» à déjouer. Livret A, LDDS, Livret d'épargne populaire (LEP) et Livret jeune ne subissent ni frais ni fiscalité, ni même les prélèvements sociaux.
En plaçant 1.000 euros sur un Livret A ou un LDDS vous gagnerez bien 5 euros (taux de 0,5%) au bout d’un an, 10 euros via un LEP (taux de 1%) et autour de 10 euros via un livret jeune (taux fixé par chaque banque sans pouvoir être inférieur à 0,5%).
La situation se complique déjà pour le PEL. Le plan d’épargne logement ne subit aucun frais mais il n’est pas exonéré d’impôts. En fait, la fiscalité dépend...de l’âge du plan !
Un PEL ouvert avant février 2015 (et après juillet 2003) sert un taux d’intérêt de 2,5%. À ce rendement il faut toutefois soustraire 17,2% de prélèvement sociaux. Sa rémunération réelle est donc de 2,07%. Pour les personnes imposables, elle tombe même à 1,75% si le plan a plus de 12 ans car les intérêts sont alors soumis à la «flat tax» de 30% (12,8% d’impôts + 17,2% de prélèvements sociaux (1)).
Les PEL ouverts depuis 2018 sont par ailleurs soumis à une fiscalité de 30% dès la première année. Leur rendement réel est donc de «seulement» 0,7%, contre 1% affiché (0,83% si vous n'êtes pas imposable).
Enfin, les livrets bancaires classiques sont également soumis à l’impôt. Le livret Distingo de PSA Banque qui promet par exemple 0,8% par an (un taux susceptible de varier), rapportera en fait 0,56% après fiscalité (0,66% si vous subissez seulement les prélèvements sociaux).
Notre conseil
Si vous détenez un PEL ouvert à partir de 2018 ou âgé de plus de 12 ans et que vous n’êtes pas imposable, pensez à renoncer à la «flat tax» et opter pour l’imposition au barème.
L'assurance vie
Les contrats d’assurance vie ont deux composantes : le fonds en euros avec garantie du capital et les unités de compte, plus risquées, qui permettent d’investir en Bourse ou dans l’immobilier.
Les fonds en euros ont, selon les estimations du Revenu, affiché en moyenne un rendement net de frais de gestion de 1,4% en 2019. Mais cette rémunération s'entend avant fiscalité. En retenant simplement les prélèvements sociaux, qui sont toujours dus, le vrai taux est en fait de 1,16%.
Dans certains cas, ce rendement est en outre encore légèrement surestimé. En effet, lorsque les assureurs prélèvent des frais d’entrée sur votre contrat, «cela minore la base sur laquelle est calculé le rendement», explique Stéphane van Huffel, directeur général de Netinvestissement.
Prenons un exemple. Vous déboursez 100 euros pour investir dans un fonds en euros facturant 3% à l'entrée. Vous ne placez donc vraiment que 97 euros. Un an plus tard, l'assureur vous annonce un rendement de 1,4%. Mais celui-ci porte sur 97 euros et non sur 100.
Vous touchez donc 1,36 euro et non 1,4 euro. Votre vrai rendement, portant sur la somme que vous avez réellement sortie de votre poche, est donc de 1,36%. Net de prélèvements sociaux il tombe à 1,13%.
L'assurance vie en Bourse
Pour les unités de compte, établir un vrai niveau de rémunération est compliqué car il dépend en premier lieu des produits qui les composent (actions ? Immobilier ? produits structurés ?).
Tout de même, vous avez peut-être constaté que les montants placés dans un fonds boursier spécialisé dans les grandes capitalisations françaises progressaient moins vite que le CAC 40. L'explication tient probablement aux frais de gestion. Ils sont facturés chaque année par l'assureur mais aussi par le gestionnaire du fonds. Cumulés, ils peuvent dépasser 3%, ce qui réduit la performance de votre investissement de trois points de pourcentage tous les ans.
Si sur le très long terme la Bourse rapporte historiquement de l’ordre de 7-8% par an, comptez plutôt sur 4-5% avec 3% de frais annuel et hors fiscalité.
Les impôts et prélèvements sociaux ne sont ponctionnés qu’à la sortie, lors d'un retrait, ce qui constitue un avantage sur le fonds en euros puisque vous pouvez gagner de l’argent sur des sommes que vous auriez payées en taxes si le fisc prélevait son dû tous les ans.
Prenons, de nouveau, un exemple concret. Vous investissez 10.000 euros, via votre contrat vie, sur un fonds en actions. Les frais d’entrée totaux s’élèvent à 3% et les coûts de gestion sont de 2,5% par an. La valeur du fonds double en dix ans, soit un rendement annuel de 7,18%.
Votre investissement n’atteindra pourtant pas 20.000 euros au bout d’une décennie mais plutôt 15.400 euros à cause des frais. Une fois retirés les prélèvements sociaux (2), votre gain réel est même d’à peine 4.500 euros. Soit un rendement effectif de 3,8% par an, nettement inférieur aux 7,18% enregistrés par le fonds sur la période.
Notre conseil
Privilégiez un contrat d’assurance vie récompensé d’un Trophée du Revenu. Les contrats distribués sur Internet, peu chargés en frais, sont conseillés pour les investisseurs autonômes.
Pour les unités de compte, étudiez les supports d’investissement disponibles. La présence de trackers est un plus car ces fonds qui répliquent la performance d’un indice boursier sont généralement très peu gourmands en frais.
Enfin, surveillez la fiscalité. Un contrat ouvert depuis plus de huit ans permet de retirer tous les ans 4.600 euros de gains (le double pour un couple marié ou pacsé) sans passer par la case impôt (les prélèvements sociaux restent dus).
Bourse : PEA et comptes-titres
Comme pour les unités de compte de l’assurance vie, établir un vrai rendement des investissements via un plan d’épargne en actions ou un compte-titres n’est pas possible puisque les portefeuilles de chaque investisseur sont différents et la volatilité du placement est élevée.
On peut néanmoins estimer dans quelle proportion les frais et la fiscalité affectent la performance de votre épargne placée en Bourse. Si vous investissez 10.000 euros sur dix actions via un PEA, les frais de courtage (équivalent à des frais d’entrée) s’élèveront au maximum à 50 euros et les droits de garde ne dépasseront pas 90 euros par an (3). Si le cours de vos titres double en dix ans – soit un rendement annuel de 7,18% -, la valeur du portefeuille devrait passer de 10.000 à 20.000 euros.
En réalité il atteindra «seulement» 19.000 euros (9.950*2 – 90*10). En cas de retrait de cet argent, de nouveaux frais de courtage de 0,5% vont en outre s’appliquer, réduisant le montant à 18.905. Soit tout de même 8.905 euros de plus-value… qui sera elle-même taxée à 17,2% dans le cadre d’un PEA ou 30% via un compte-titres. Les gains diminuent ainsi à 7.373 euros et 6.234 euros respectivement.
Comparé au rendement de 7,18% par an affiché par les actions sur la période, votre rémunération annuelle réelle ressort à 5,7% (PEA) ou 5% (compte-titres).
Notre conseil
Bonne nouvelle. Les frais de courtage et les droits de garde des PEA seront plafonnés le 1er juillet prochain. D’importantes différences devraient toutefois perdurer entre les banques.
Pour limiter les coûts au maximum, préférez un acteur en ligne (les frais de transfert de PEA vont aussi être plafonnés !) qui ne facturera généralement aucun frais de garde. Coté fiscalité, le plan d’épargne en actions est à privilégier.
Immobilier locatif, SCPI
Le calcul du vrai rendement de l’investissement en immobilier est particulièrement ardu car il existe de nombreux types de placements dans la pierre, chaque projet affiche sa rentabilité propre et la fiscalité peut fortement varier (4).
Quelques grandes situations relativement générales peuvent malgré tout être décortiquées.
Les SCPI : un rendement (presque) vrai
La cas de la pierre papier est le plus facile à étudier. Les sociétés civiles de placement immobilier communiquent chaque année un niveau de rendement, correspondant aux loyers reversés à l’épargnant. Annoncés nets de frais, ceux-ci le sont-ils vraiment ?
La réponse est plutôt oui. Si les frais d’entrée sont très élevés sur ce type de placement (de l’ordre de 8-10%), contrairement à l’assurance vie, «ils ne sont prélevés que lors de la revente des parts», précise Paul Bourdois, co-fondateur du site FranceSCPI.com. «Cela signifie que si vous investissez 100 euros, la totalité de la somme sera placée et génèrera du rendement». Les frais facturés en cas de sortie réduisent néanmoins la rémunération globale.
Surtout, les revenus tirés de cet investissement ne sont, pour la plupart, pas imposables à la «flat tax» comme les gains financiers. Ils dépendent du barème progressif et seront donc taxés à 11%, 30%, 41% ou 45% selon le taux marginal. S’ajoutent également les prélèvements sociaux de 17,2% pour un total qui peut donc dépasser les 62%.
Au global, le rendement réel de l’investissement peut ainsi être drastiquement réduit pour les personnes les plus imposées. Si votre taux marginal est de 30%, un rendement affiché de 4,5% ressortira en fait à 2,38% après paiement des impôts et prélèvements sociaux (hors cas de SCPI achetées à crédit avec intérêts déductibles).
Pour échapper à cette fiscalité, il est possible d’acheter des parts de SCPI via l’assurance vie mais les rendements servis sont généralement plus faibles car l’assureur ajoute une couche de frais supplémentaire et souvent ne redistribue que 85% des loyers versés par la SCPI..
Immobilier locatif en direct
La rentabilité d’un investissement dans un bien immobilier en vue de le louer est impossible à établir de manière globale, tant elle dépend de chaque opération. L’achat est-il entièrement financé à crédit ? Le bien est-il loué vide ou meublé ? Des travaux ont-ils été réalisés ?
Ces éléments et bien d’autres influent fortement la façon de calculer la performance du placement.
Pour un logement acheté 200.000 euros et loué 1.000 euros par mois, le rendement locatif devrait être de l’ordre de 6% (12.000/200.000). Mais c’est sans compter les charges non récupérables auprès du locataire, la taxe foncière ou les éventuels frais d’agence qui viennent en réduction des revenus tirés du logement. Les frais de notaire (principalement les droits de mutation dus à l’État) augmentent également le prix d’achat, ce qui réduit le rendement effectif.
Enfin, la fiscalité peut être très pénalisante. Elle dépend du régime choisi, du taux marginal d’imposition et du type de logement (vide ou meublé). Pour un bien loué vide en micro-foncier, les revenus bénéficient d’un abattement forfaitaire de 30%.
Dans notre exemple, le propriétaire ne déclarera ainsi «que» 8.400 euros de loyers. S’ils sont taxés à 47,2% (30% + 17,2% de prélèvements sociaux), les revenus réels tombent à 8.035 (12.000-8.400*0,472). En ajoutant 7% de frais de notaires au prix d’achat, une taxe foncière de 1.000 euros par an et des charges non récupérables de 500 euros, le vrai rendement de cet investissement locatif ressort à environ 3,05%... à condition que le logement soit toujours loué.
Notre conseil
Les SCPI doivent s’inscrire dans une logique d’investissement de très long terme et avec l’objectif de générer un complément de revenus plus que la constitution d’un patrimoine. Si vous souhaitez les acheter via une assurance vie, prenez garde aux conditions fixées par l’assureur.
L’immobilier locatif en direct est un placement surtout intéressant s’il est réalisé à crédit. Avec l’effet de levier, la rentabilité finale peut se révéler très élevée. Un tel investissement doit toutefois être étudié avec soin et peut être très chronophage si vous ne recourrez pas aux services d’une agence (qui réduisent la rentabilité).
(1) Dans un souci de clarté, nous supposons dans cet article que l’épargnant a intérêt à opter pour une imposition à la «flat tax» de 30% (12,8% de prélèvement forfaitaire unique et 17,2% de prélèvements sociaux) lorsque c’est possible. Pour les personnes non imposées ou dont le taux marginal d’imposition est de 11%, il est généralement avantageux de choisir une imposition au barème. Les rendements réels de certains placements (PEL, comptes-titres et livrets bancaires notamment) sont alors plus favorables.
(2) On suppose que les retraits sont effectués sur deux années distinctes pour profiter deux fois de l’abattement de 4.600 euros.
(3) En retenant des frais de courtage de 0,5% et des droits de garde de 0,4% + 5 euros par ligne, niveaux qui correspondent aux plafonds fixés par la loi Pacte pour les PEA et qui entreront en vigueur le 1er juillet prochain. Selon l’outil de simulation de l’AMF.
(4) Dans cet article, nous n’étudions pas les cas, particuliers, d’investissements locatifs bénéficiant d’un programme de défiscalisation (Pinel, Denormandie…).
June 27, 2020 at 12:39PM
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